Ecrit par JP. Mohen et Y. Taborin
Hachette Supérieur, nouvelle édition 2005
Un livre complet et complexe dans l'organisation de ses rubriques, mais d'une richesse sans conteste.
Espèce : Ensemble des êtres vivants ayant en commun des caractères distinctifs et pouvant se reproduire entre eux. Homo sapiens sapiens correspond à une seule espèce.
Gradualisme : Théorie qui explique l'évolution par une adaptation génétique lente d'une population vers une plus grande efficacité. Cette théorie doit donc être étudiée dans une optique historique.
Ontogénèse : Histoire du développement d'un individu depuis sa conception
Phénotype : Ensemble de caractères issus du génotype, mais transformés par des facteurs extérieurs au cours du développement de l'individu.
Phylogénèse : Histoire du développement de l'évolution d'une espèce.
Spéciation : Apparition d'une nouvelle espèce à partir d'autres espèces
Théorie des stases : L'évolution aurait marqué dans le temps des ralentissements après de courtes périodes de changements rapides.
Théorie de l'équilibre ponctué : Chaque population réagit à son environnement habituel et se sépare de la population mère si l'environnement est différent de celle-ci
Une des singularités de l"espèce humaine, c'est son intelligence ... Est-elle la plus développée du règne animal à ce jour ? Ca se discute ! En tout cas, elle s'est considérablement améliorée au fil de l'évolution, depuis nos ancêtres préhumains jusqu'à nous, dernière espèce représentante du genre homo.
Parmi les prétendants à ce joli parcours, nous trouvons bien évidemment le cerveau, lieu de cette intelligence performante ; si tous les éléments présents aujourd'hui l'étaient déjà chez nos ancêtres, l'augmentation de son volume semble avoir été un paramètre déterminant pour permettre leur exploitation, et notamment, la notion d'association qui permet au cerveau humain de figurer au rang des animaux créatifs, inventifs, artistiques, ...
La bipédie, source d'intelligence ?
La bipédie est un élément incontournable pour expliquer l'accroissement du cerveau ; le basculement du foramen magnum (trou du crâne par lequel la moelle épinière de la colonne vertébrale entre en contact avec le cerveau) de l'arrière vers l'avant permet l'équilibrage de la tête au dessus de l'axe de portage du corps atteste de la station verticale d'une espèce. Comment est-elle devenue une caractéristique de notre espèce? Seules des hypothèses pourront être avancées à ce jour : un mâle pourrait avoir trouvé cette stratégie pour être dominant et l'aurait transmise à ses descendants ou encore, comme on l'entend plus souvent, l'environnement moins boisé l'aurait imposé pour voir par dessus les hautes herbes (cependant, cela signifierait le développement prééminent de la vue sur les autres sens - cf Cyrulnik, "la naissance du sens").
La bipédie apporte deux avantages prépondérants : tout d'abord, cette tête portée bien en équilibre permet de voir son poids augmenter (et donc son volume encéphalo-crânien) ; par ailleurs, elle libère la main qui peut servir à autre chose qu'à la locomotion ... réfléchir à quoi elle peut servir est déjà une action stimulante pour l'intelligence.
On peut imaginer un parallèle entre le stade de l'intelligence sensori-motrice telle que l'a conceptualisée Jean Piaget dans sa théorie du développement de l'intelligence chez l'enfant et ce moment du développement de l'intelligence de l'espèce humaine : l'utilisation du corps, réfléchie, intellectualisée, intentionnalisée, amène le cerveau et l'intelligence qu'il 'contient' à élaborer des capacités nouvelles. La prudence est cependant de rigueur, car certains grands singes utilisent eux-aussi des outils, en position assise, alors que leurs mains servent également à la locomotion arboricole.
Régime alimentaire et gros cerveau
Nombres d'auteurs ont défendu l'hypothèse selon laquelle le régime alimentaire serait grandement responsable de l'accroissement cerébral de l'espèce humaine : en effet, si le cerveau représente 2% de la masse corporelle, il réclame 20% de l'énérgie consommée pour son fonctionnement. Ainsi, l'évolution d'une alimentation plutôt végétarienne à une nourritue plutôt carnée pourrait avoir été un facteur de développement du cerveau, d'autant plus qu'elle induit la nécessité d'une organisation collective pour la chasse de plus gros animaux.
Par ailleurs, l'invention de la cuisson des aliments entraine une mastication moindre pour une meilleure assimilation des qualités nutritives ; la domestication du feu et son utilisation culinaire a probablement contribué à l'hominisation de l'espèce, tant dans l'aspect nutritionnel que du point de vue social, à travers le regroupement du clan au moment du repas.
sources :
'Les sociétés de la préhistoire', J.P. Moyen et Y. Taborin
http://w3.hep-bejune.ch/formateurs/salleclasse/lionneldubois/notions%20theoriques/otzi,_l'homme_des_glaces.htm
L'évolution est le processus par lequel une espèce donne naissance à une ou plusieurs autres espèces : au sein de chaque population existe une variation du phénotype héritable, qui se traduit par une meilleure adaptation à son environnement, transmise de génération en génération. Ce processus, définit par Darwin, a été nommé par lui "séléction naturelle".
Une espèce est caractérisée par l'interfécondité de ses membres ; elle trouve donc ses limites dans son incompatibilité reproductrice avec d'autres espèces.
La spéciation trouve son origine dans une reproduction génétiquement altérée : au fil de l'évolution, les chromosomes se sont parfois cassés, des morceaux se sont dissociés, recollés, ... Ceci a pu être dû à des erreurs de recopiage de l'ADN, à un changement environnemental, ou d'autres raisons qui ne sont pas toujours connues. Elle doit se produire en marge de la population concernée, de sorte à ne pas être "réabsorbée" par l'espèce d'origine. Pour que des mutants puissent se perpétuer, il faut qu'ils soient très vite isolés, sinon leur mutation se dilue dans la population mère
En d'autres termes, il faut qu'un petit groupe s'isole et se transforme : une petite population se trouve isolée dans un environnement différent de celui d'origine, elle subit un certain nombre de transformations génétiques qui l'empêchent de se reproduire avec la population dont elle s'est séparée. Si elle survit dans son nouvel environnement, elle s'impose comme une espèce nouvelle.
Cependant, en réalité, peu d'innovations survivent : la sélection naturelle en élimine la majeure partie.
Aujourd'hui, on constate que la quasi-totalité des gènes humains sont organisés comme ceux du chimpanzé, mais ils ne sont pas toujours situés au même endroit sur les chromosomes : on a repéré neuf grandes différences d'emplacement entre les deux espèces. Entre autre, la deuxième paire de chromosomes humains équivaut à l'addition de deux paires que l'on trouve distinctes chez le chimpanzé ... un héritage de notre lointain ancêtre commun !
Caractéristiques physiques :
Taille : 1.55 à 1.70 m, voire 1.80m
Poids : 50 à 70 kg
Homo sapiens sapiens, c'est vous, c'est moi, c'est le seul représentant du genre à l'heure actuelle.
Homo neandertalensis et Homo floresiensis (cf rubrique 'Les ancêtres') ont cohabité pendant plusieurs milliers d'année avec Homo sapiens sapiens, notre ancêtre direct, mais il semble que seul ce dernier ait franchi la révolution néolithique, marquée par le passage d'une économie de prédation à une économie de production, avec la sédentarisation qui l'accompagne.
Dans la période précédente, lors du paléolithique supérieur, nous lui devons la création de l'art rupestre, ce que nous considérons avec le recul comme l'une de nos spécificités humaines. On associe volontier à cette pratique des notions spirituelles, voire du chamanisme : certains voient ici l'invention de la religion.
Avant de s'établir partout dans le monde, comme l'avait fait Homo erectus avant lui, tout concorde à penser que Homo sapiens sapiens est né en Afrique, une évolution parmi d'autres possibles, mais qui reste la seule à avoir perduré jusqu'à ce jour dans la famille Homo.
Sources :
"Le genoux de Lucy" par Yves Coppens, Odile Jacob, 2000
www.hominides.com
Le site de France 3 propose un petit jeu flash, sans prétention, mais éducatif, pour replacer chaque forme évolutive de notre espèce et de nos ancêtres dans leur culture et leur environnement.
http://www.homo-sapiens.france3.fr/index2.php?menu=jeu2
Un bon moyen de promotion des connaissances à ce sujet.
"L'émergence de l'homme - Essai sur l'évolution et l'unicité humaine", écrit par Ian Tattersall en 1998
Editions Gallimard, 1999 pour l'édition en langue française.
Dans cet ouvrage passionnant, Ian Tattersall (Directeur du département d'anthropologie à l'American Museum of Natural History à New York) fait le point sur les connaissances que nous avons actuellement du chemin parcouru pour aboutir à ce que nous sommes aujourd'hui : l'homo sapiens sapiens.
Il balaie notamment l'idée d'une évolution lente et linéaire de l'hominidé vers l'être humain (presque) parfait que nous pensons être aujourd'hui : il défend la théorie du "buisson" qui considère les tatonnements, les adaptations et les compétitions qui ont prévalus dans l'apparition et l'extinction de diverses variétés, espèces et genres.
Au sujet de sa théorie, il dit : "Le buisson, c'est désormais l'image de l'évolution qui se dégage des découvertes advenues au cours de ces vingt dernières années. Des branches mortes multiples et sans descendance, une évolution qui tâtonne, qui bricole sous l'empire du seul hasard, au point qu'il n'y a pas « naissance » de l'homme, mais « émergence », fruit imprévu d'adaptations contingentes."
Entre autres, il souligne que notre époque est la seule à n'avoir plus qu'une seule espèce humaine, toutes les autres ayant eu au moins 2 espèces de cette filiation.
Ce livre est à découvrir pour tous ceux qui s'intéressent à l'origine de l'espèce humaine.